dimanche 31 janvier 2010

Lire AVEC ou SANS dictionnaire?

Essayer de lire un livre en langue étrangère peut être une vraie catastrophe: vous pensez ne pas avoir a priori assez de lexique, vous faites face à une page où vous ne voyez que des mots ou des expressions inconnus de vous, ou pire, vaguement connus car appris un jour mais oubliés depuis. Vos efforts et bonnes résolutions s'écroulent très rapidement en vous laissant un sentiment d'échec dont il est difficile de vous départir. Cela vous rappelle du vécu?
Pourtant, je vous encourage à persévérer: lire un livre étranger en version originale peut devenir un cercle vertueux: plus vous lisez, plus vous êtes confiant dans votre possibilité de comprendre ce qui est écrit , puis vous êtes confiant dans votre capacité à comprendre, plus vous avez envie de lire, l'activité s'avère 'confidence-building'.

Mais comment faire pour que la lecture soit un PLAISIR et non une corvée?

Je suis justement en train de lire le livre (en allemand) dont je parle dans mon message du 21 janvier 2010. Voici mes premières conclusions de lectrice non spécialiste (de l'allemand!):
  • il est très important de ne pas se tromper sur son niveau de lecture (cf message du 14 juin 2009).
  • c'est plus facile de commencer par un livre dont on connaît l'histoire, le contenu (cf message du 15 juin 2009).
  • il vaut mieux choisir un livre avec des courts chapitres; on vient à bout de ces petites unités de sens assez vite. Ce sentiment d'accompli est essentiel pour un lecteur débutant: il prend confiance en ses capacités.
  • il ne faut pas interrompre sa lecture pour aller chercher le sens des mots inconnus dans le dictionnaire. On perd le fil du récit et cela ressemble très vite à un exercice scolaire fastidieux.
  • en revanche, je vous conseille d'avoir une feuille de papier et un stylo juste à côté pour noter les mots difficiles TOUT EN ESSAYANT de deviner leur sens en français (ou dans une autre langue, si vous avez été convaincu(e) par mon message sur le plurilinguisme!). Cette opération de déduction (on parle aussi d'inférence) vous rend actif et vous aidera à vous sentir de plus en plus à l'aise parce vous allez vous apercevoir que vous êtes tout à fait capable de trouver sinon la traduction du mot en question, au moins son sens général. Qu'il me soit permis ici d'emprunter les mots de Mme Lhérété, Inspectrice Générale d'Anglais, qui parle de 'colmatage de blancs'. C'est tout à fait ce qui se passe quand on lit dans une langue étrangère: vous ne connaissez pas tel mot, mais si vous vous appuyez sur ce que vous comprenez ou reconnaissez (la formation du mot, sa place dans la phrase, le contexte, ...) vous êtes en mesure d'imaginer ce que ce mot inconnu peut vouloir dire. Inscrivez alors votre hypothèse sur ce papier.
  • ensuite seulement, une fois le chapitre fini, allez chercher dans le dictionnaire le sens des mots à problème. Vous serez surpris du nombre de mots dont vous avez bien deviné le sens (même si on est parfois un peu loin; personnellement, j'ai relevé 'der Mund' dans le roman en allemand; j'ai compris qu'il s'agissait d'une partie du visage, mais j'ai été incapable de dire laquelle. J'ai noté 'menton ou nez ou bouche'). Le dictionnaire m'a plus tard appris qu'il s'agissait de la bouche.).
  • rien ne vous empêche alors de noter les mots nouveaux dans un carnet si vous voulez les mémoriser.

jeudi 21 janvier 2010

'Au secours: je manque de vocabulaire!'

Voilà ce que la plupart d'entre nous déclarons quand nous sommes confrontés à des étrangers, notamment à des Anglophones (qui 'parlent trop vite' ou qui 'n'ont pas le même accent que ma prof'. En France, nous avons malheureusement été éduqués dans l'idée que 'bien parler une langue étrangère, c'est être bilingue'. C'est en train de changer, grâce aux apports du Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (cf messages de juin 09 sur ce blog).

J'écris le message d'aujourd'hui à la suite d'une conférence sur ce Cadre Européen; une des pistes que cet ouvrage indispensable propose (et que l'Education Nationale n'a pas retenue), c'est le plurilinguisme. Il s'agit d'apprendre ou d'améliorer son niveau dans une langue vivante en s'aidant de ce que l'on connaît déjà dans une autre langue étrangère. Nous ne le faisons presque jamais en classe, essentiellement parce que les enseignants français sont diplômés dans une seule langue, et que la même réserve (celle du silence si nous ne sommes pas bilingues) s'applique ici aussi.

C'est très dommage, et je vous propose d'essayer cette pratique (résolution de début d'année!).
Le plus facile, c'est de faire des liens entre des langues de la même famille: l'anglais et l'allemand (langues germaniques), l'espagnol, le français et l'italien (langues romanes), etc.
L'idée est de créer à partir de ce qui est connu un répertoire plurilingue:
- au niveau du vocabulaire (Fr: 'Comprendre' - Ang: 'Understand' - All: 'Verstehen')
- au niveau grammatical (l'expression de la possession: Ang: 'John's car' - All: 'Johanns Wagen' ou l'expression de la comparaison: Ang: 'better than' - All: 'besser als' ou bien encore les fameux verbes irréguliers en anglais et les non moins abominables verbes forts en allemand!)

Si vous connaissez mieux l'espagnol et pas du tout d'allemand, rien ne vous empêche de faire des ponts avec l'anglais. L'important est de se baser sur des savoirs déjà activés pour ajouter de nouvelles connaissances et de les mettre en relation .
Il a été démontré que lorsque nous apprenons quelque chose de nouveau, cela se greffe sur ce que nous savons déjà. Le plurilinguisme (en tout cas ce que j'en ai retenu!) nous amène à relier de façon consciente le nouveau avec le déjà appris et retenu.

A ce propos je vous conseille vivement la lecture d'un livre génial:
'L'aventure des langues en Occident' de Henriette Walter, publié en 1994.
Cette incroyable linguiste y répertorie avec talent, clarté et beaucoup d'humour ces fameux ponts entre les langues parlées dans l'Europe d'aujourd'hui.

Personnellement, après de longues années de non utilisation de la langue allemande que j'ai apprise au collège et lycée (j'étais Allemand 1ère langue jusqu'au bac!), je me lance dans cette aventure du plurilinguisme et vous raconterai prochainement l'avancée - ou pas - de mon répertoire plurilingue. Mon projet, c'est de lire 'Der Vorleser', 'Le liseur' de Bernard Schlink, que j'ai lu (et adoré!) en français...